Achats publics d’énergie, la dernière ligne droite

Paul RavettoPatrick LabaylePaul Ravetto & Patrick Labayle
Avocats Associés
RAVETTO ASSOCIÉS
Intervenants EFE à la formation « Achats publics de gaz » le 26 mars 2014 à Paris

Si un nombre croissant d’acteurs publics a d’ores et déjà exercé son éligibilité pour sortir des tarifs réglementés de vente d’énergie, principalement de gaz, la majorité d’entre eux reste à ce jour en attente de l’évolution du cadre légal et règlementaire.

Avec la loi NOME du 7 décembre 2010 et la future loi sur la consommation en cours de publication, ce cadre juridique est appelé à connaître une mutation d’importance, en soumettant l’achat de gaz et d’électricité aux règles de commande publique. Les éventuelles mesures transitoires susceptibles d’être adoptées en faveur des opérateurs publics ne sont à ce jour pas connues précisément, alors que les échéances du 1er janvier 2015 et du 1er janvier 2016 sont annoncées pour les clients en gaz dont le niveau de consommation par site est supérieur, respectivement, à 200 MWh et à 30 MWh par an.
Si les fournisseurs, historiques ou non, ont déjà expérimenté les premières consultations publiques pour la fourniture d’énergie, il appartient à présent à l’ensemble des acteurs publics de s’approprier ce nouveau mode d’acquisition.

Un nouvel environnement

Pour les collectivités et acteurs publics non spécialisés, l’achat d’énergie se présente comme une opération complexe, nécessitant une connaissance approfondie des règles de la commande publique ainsi que du marché de l’énergie.
Dans un contexte où le bénéfice des tarifs réglementés a tenu la question de la fourniture hors du champ concurrentiel, il est nécessaire de se familiariser avec le fonctionnement du secteur afin d’en comprendre les principes techniques et économiques. Il est ensuite impératif que les collectivités puissent identifier avec précision leurs besoins afin de préparer l’opération d’achat. Elles doivent pour cela déterminer au plus près leurs profils de consommation et leurs besoins futurs. Il convient à ce titre d’être vigilent sur l’articulation entre le périmètre des contrats dédiés à l’achat d’énergies et celui de contrats distincts également susceptibles d’être concernés (éclairage public, installations de chauffage, contrats de performance énergétique, etc.).

Une tendance au regroupement des commandes

Les particularités de l’achat public d’énergie conduisent certaines collectivités à recourir aux mécanismes de coordination prévuspar le Code des marchés publics.
La formule du groupement de commandes se révèle à cet égard être un instrument juridique particulièrement adapté à l’achat public d’énergie. En effet, les personnes publiques ne disposent pas nécessairement de toutes les compétences pour mettre en place rapidement une consultation etl’achat groupé permet de confier à un acheteur unique la charge de préparer et conduire la consultation. L’expérience montre que les syndicats d’énergie sont à même de jouer un rôle central, sans qu’il soit nécessaire de leur transférer une compétence particulière. En pratique, cette étape de mise en place du groupement devra être bien anticipée et intégrée au calendrier global de l’opération. D’autres acteurs publics pourraient également jouer ce rôle de chef de file et le recours à la centrale d’achat pourrait par ailleurs être envisagé. De plus, la massification des achats peut générer des économies d’échelle, à condition toutefois que les lots soient correctement élaborés.

L’accord-cadre, un contrat particulièrement adapté

L’achat public d’énergie suppose ensuite que les collectivités s’interrogent sur le type de contrat auquel elles peuvent recourir. Or, à côté des marchés publics « traditionnels », l’accord-cadre se révèle être un outil contractuel pertinent en matière d’achat public d’énergie, en particulier de gaz.
Comme les marchés classiques, l’accord-cadre offre aux collectivités la possibilité de ne pas indiquer la quantité précise d’énergie qui devra être fournie, celle-ci étant constatée à l’issue d’une période mentionnée dans le contrat. A la différence des marchés publics, l’accord-cadre présente surtout l’avantage de pouvoir acheter l’énergie dans des délais raccourcis en passant les marchés subséquents en quelques jours, voire quelques heures seulement. Cette célérité réduit l’exigence mise à la charge des  fournisseurs de maintien du délai de validité de leur offre et par conséquent le risque de son renchérissement qui est particulièrement élevé en raison de la volatilité du prix de l’énergie. Il demeure que, de façon générale, l’accord-cadre reste une formule contractuelle peu utilisée à ce jour en comparaison des marchés publics et que,si elle permet une remise en concurrence rapide, elle suppose également un important travail de préparation en amont.

Les spécificités de l’achat d’énergie

Outre le choix de la forme contractuelle adéquate, plusieurs points, notamment d’ordre économique et financier, devront faire l’objet d’une attention soutenue lors de la préparation des futures consultations.
Dans un contexte où l’ensemble de la documentation contractuelle est à préparer, il conviendra tout d’abord de prévoir un cadre de facturation adapté, en détaillant le cas échéant une part fixe et une part variable. Ce sujet devra être abordé avec vigilance dès lors que la part abonnement peut relever d’un régime fiscal distinct de la part variant en fonction de la consommation, ce qui est susceptible d’avoir un impact sur la comparaison des offres.
Par ailleurs, les conditions observées sur les marchés de l’énergie permettent aux fournisseurs de proposer un prix ferme compétitif, au jour de l’attribution du contrat, ce qui pourrait être attractif pour les acheteurs. Cependant, le Code des marchés publics n’autorise pas ce choix en tendant à obliger les acheteurs à prévoir une clause de révision des prix, ce qui imposera de sélectionner attentivement les indices dont l’évolution devra pouvoir être contrôlée par les comptables publics.
Sur les aspects financiers, les conditions de facturation devront également donner lieu à un encadrement précis dans le contrat, en particulier au regard de l’existence de plusieurs sites et points de livraison que l’acheteur souhaiterait voir regroupés dans une facturation unique.
Enfin, les relations avec le gestionnaire du réseau de distribution devront être prises en compte lors de la préparation de la consultation, dans un souci d’efficacité du traitement de l’achat d’énergie.

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