Platesformes industrielles : de quoi s’agit-il ?

responsable sécurité

La notion de plateforme industrielle est entrée dans le vocabulaire juridique par une circulaire du 25 juin 2013[1]. A l’époque, il s’agissait déjà de mutualiser la création des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) pour certains ensembles d’installations classées identifiés et fixés par liste.

L’article 144 de la loi Pacte, adoptée le 22 mai 2019, introduit ensuite la notion de « plateforme industrielle » dans le Code de l’environnement à l’article L. 515-48.

Son décret d’application est paru le 22 novembre 2019 avec pour objectif de renforcer et clarifier les règles de fonctionnement de ces plateformes industrielles et « d’en assurer le meilleur niveau de sécurité industrielle et environnementale ». Ces nouvelles dispositions, approuvées à l’unanimité par le Conseil Supérieur de la Prévention des Risques Technologiques (CSPRT), entreront en vigueur au 1er janvier 2020.

Leur particularité réside dans leur volonté d’opérationalité (I) à géométrie variable (II).

Une opérationnalité…

Jusqu’à présent, les textes envisageaient ces installations de manière individuelle sans proposer de statut pour les cas de regroupement tenant à la mutualisation de certains moyens. Désormais, la logique de mutualisation évolue au sein d’un cadre juridique fixé autour de la notion de plateforme industrielle.

Le ministère de la Transition écologique explique que la notion vise « de grandes plateformes industrielles, parfois créées il y a quelques dizaines d’années autour d’une entreprise unique et qui ont connu depuis des évolutions de propriétaires, de gouvernance et de fonctionnement »[2].

Les nombreuses cessions d’activités industrielles ont entraîné la fragmentation de certains sites qui continuent à partager des biens ou des services dans le cadre de leur fonctionnement. Dans ce contexte, l’élargissement de la notion de plateforme industrielle au-delà de l’instauration d’un plan de prévention des risques a été mis en œuvre.

L’objectif est de permettre la réalisation d’une politique de gestion cohérente de certains sites composés d’ICPE au sein desquels la mise en commun de certains moyens est déjà existante ou envisageable. La synergie entre les installations présentes sur un même site est encouragée. Il peut par exemple s’agir de partager la gestion des déchets sur site, la surveillance ou encore la consommation d’énergie.

L’article L. 515-48 du Code de l’environnement définit les plateformes industrielles comme « le regroupement d’installations mentionnées à l’article L. 511-1 sur un territoire délimité et homogène conduisant, par la similarité ou la complémentarité des activités de ces installations, à la mutualisation de la gestion de certains des biens et services qui leur sont nécessaires. ».

Les plateformes ainsi identifiées sont inscrites sur une liste fixée par un arrêté du ministre chargé des installations classées pour la protection de l’environnement. Aux termes du décret du 21 novembre 2019, cette inscription est subordonnée à la conclusion d’un contrat entre les installations qui souhaitent être identifiées comme appartenant à la plateforme industrielle.

… a géométrie variable

Une crainte du contournement de certaines règles de protection de l’environnement lors de la mise en œuvre des dispositions relatives aux plateformes a pu être manifestée. L’exposé des motifs de l’amendement à la loi Pacte relatif à l’introduction de la notion de plateforme industrielle précise que « ces adaptations ne devraient pas conduire à remettre en cause le niveau des exigences en matière de prévention des risques et des pollutions et de protection de l’environnement, ni les principes de responsabilité résultant du code de l’environnement. ». La liste des plateformes est fixée par arrêté du ministre chargé des ICPE.

Le contrat de plateforme régit la plateforme industrielle et lie les parties signataires c’est-à-dire les exploitants des installations constituant la plateforme. Le contrat désigne un gestionnaire de plateforme parmi les personnes morales exploitantes d’une installation prenant part à la plateforme.

 Le contrat doit déterminer les domaines de responsabilité qui font l’objet d’une gestion mutualisée, et pour chacun les responsabilités conservées ou attribuées au gestionnaire de plateforme. Il définit également les conditions d’évolution de la composition de la plateforme et détermine les responsabilités en cas de résiliation ou suspension de la plateforme.

C’est le gestionnaire de la plateforme qui présente le dossier de demande d’inscription sur la liste des plateformes industrielles au préfet du département sur lequel la plateforme est située. Ce dernier dispose d’un délai de deux mois pour formuler des observations sur le projet de plateforme, puis il transmet le dossier de demande assorti de son avis au ministre chargé des installations classées. C’est à lui qu’il revient d’inscrire la plateforme sur la liste des plateformes industrielles. Son silence gardé au-delà de deux mois vaut rejet de la demande.

Le contrat de plateforme est un instrument contractuel offrant une liberté d’organisation dans la gestion des biens et services mutualisés et les responsabilités qui y sont associées.

Par ailleurs, certaines adaptations peuvent être mises en œuvre en fonction de la situation des installations présentes sur une plateforme industrielle[3]. Le préfet peut notamment prescrire par arrêté aux partenaires toute mesure propre à améliorer substantiellement le niveau de protection de la plateforme.

Ces adaptations pourront être décidées par le préfet en cas d’installation nouvelle ou d’extension d’une installation existante au sein d’une plateforme.

De manière générale, toutes les modifications au contrat de plateforme doivent être communiquées au préfet dans le respect du porter à connaissance régulièrement mis en œuvre en droit des installations classées.

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[1] https://www.bulletin-officiel.developpement-durable.gouv.fr/documents/Bulletinofficiel-0026979/met_20130014_0100_0060.pdf

[2] https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/elisabeth-borne-encadre-regles-fonctionnement-des-plateformes-industrielles-en-renforcer-lexigence

[3] C. envir., R. 515-119

Patricia SAVIN
Avocate Associée, Docteure en droit
DS AVOCATS