Prévenir les risques sanitaires dans les bâtiments : quelles démarches ?

photo vincent vanelVincent Vanel
Consultant, Direction Eco-innovation
GREENATION
Animateur EFE de la formation «Prévenir et gérer l’impact sanitaire des bâtiments » des 17 et 18 décembre 2014 à Paris

Rédaction Analyse Experts : La santé dans les bâtiments est une préoccupation majeure aujourd’hui comment est-elle abordée aujourd’hui les maîtres d’ouvrages et les maîtres d’œuvre

Vincent Vanel : La santé et la sécurité des occupants et utilisateurs des bâtiments sont une préoccupation majeure des pouvoirs publics. Le dossier de l’amiante en particulier a servi de révélateur il y a quelques années.

Autre exemple lié au confort hygro-thermique, une humidité importante, supérieure à 70 %, va favoriser le développement des moisissures et autre flore fongique à l’origine d’allergies ou de problèmes respiratoires. A l’opposé, une humidité inférieure à 30 % devient très inconfortable car elle provoque un dessèchement des muqueuses et le développement d’infection bactérienne ou virale (sinusite, bronchite, infections pulmonaires).

Si la prise de conscience date du début des années 1900, la publication scientifique à ce sujet ne s’est intensifiée qu’à partir de 1980. L’Observatoire de la qualité de l’air intérieur a par ailleurs été créé en 2001.

La qualité de l’air dans les bâtiments est aujourd’hui principalement abordée sur l’aspect sanitaire et confort des usagers à travers l’atteinte de niveau de performance P et TP du référentiel HQE(TM) (cibles 2, 3, 4, 6, 7, 8, 11, 13).

Le référentiel HQE(TM) Performance introduit une obligation de résultats à travers des indicateurs mesurables de qualité de l’air intérieur.

Rédaction Analyse Experts : Quelles sont les problématiques le plus fréquemment rencontrées ?

Vincent Vanel : La construction de bâtiments confortables, sains et économes en énergie nécessite de concilier les performances énergétiques, acoustiques, de maintenance et de qualité de l’air intérieur.

Ainsi, des salles de réunion de bureaux ou amphithéâtre peuvent être occupées seulement 10 % du temps et qu’un système de ventilation couplé à une sonde de CO2 est donc envisageable. Dans ce cas, le couple qualité de l’air intérieur (QAI)/performance énergétique est optimisé.

De nature physique, chimique ou biologique, les polluants présents dans l’air intérieur (oxydes d’azote, monoxyde de carbone, particules/fibres et COV…) sont nombreux et leurs sources multiples : l’environnement du bâtiment (sol et l’air extérieur), les appareils à combustion (notamment de chauffage et de production d’eau chaude), les matériaux et produits de construction, d’ameublement, de décoration, d’entretien, les plantes et les animaux (pollens, allergènes, acariens…), la présence de certaines activités humaines (tabagisme, cuisine ou d’entretien, l’utilisation des salles d’eau, l’utilisation d’équipements de bureautique, etc.).

La multiplicité de ces facteurs rend la pollution de l’air intérieur très difficile à appréhender.

Deux approches sont systématiquement étudiées : la réduction des émissions à la source / les procédés d’évacuation par l’aération et la gestion des pollutions.

Parmi la multitude de produits de construction (gros œuvre, second œuvre, entretien), la première difficulté est d’identifier les matériaux/équipements adaptés à la destination et à l’usage du bâtiment. C’est le travail du programmiste, du maître d’ouvrage et du concepteur. Cela demande un gros travail de veille technologique et de documentation technique (FDES, ACV, FDS,…).

La seconde difficulté est de pouvoir assurer un approvisionnement en quantité suffisante de ces matériaux et accepter le surcoût des produits à faible impact environnemental et sanitaire.

Une vision RSE incitera à privilégier un sourcing local afin de ne pas nuire au bilan global par un fort impact environnemental du produit. C’est le rôle du service Achats.

Une troisième difficulté repose sur l’acceptabilité sociale (nouveau comportement, consultation, communication, formation) et la surveillance des performances par zones d’usage telle que définie dans l’article L. 221-8 du code de l’environnement.

Rédaction Analyse Experts : De la conception à l’exploitation des bâtiments, quels sont les points de vigilance essentiels à respecter pour limiter les impacts sur la santé ? 

Nous passons en moyenne 80 % de notre temps en espace clos ou semi-clos, que cela soit dans les logements, lieux de travail, écoles, espaces de loisirs, commerces, transports, etc. Pour de nombreux polluants, les concentrations intérieures aux bâtiments sont souvent plus élevées que les concentrations extérieures.

Si aérer et ventiler permettent de diluer les polluants, cela ne les élimine pas totalement. La solution la plus efficace et la plus durable est d’agir à la source.

Les produits de construction, définition et d’ameublement jouent un rôle non négligeable sur la qualité de l’air intérieur.

L’analyse de site permettra dès la phase programmation de définir les opportunités de réduction « passive »des sources d’inconfort et de pollution (air pollué, risques naturels et technologiques (antennes, radon, plomb, amiante, xylophages, usines voisines…, orientation des vents dominants) et orienter le choix d’équipements (chauffage, CTA, climatisation) et matériaux adaptés.

En phase projet, le concepteur devra spécifier des performances acoustiques, thermiques, de qualité de l’air, d’entretien et d’usage élevées pour les équipements et les systèmes.
Le choix des matériaux et systèmes sera fait selon des critères de responsabilité sociale et environnementale.

C’est pourquoi, il est important de privilégier des matériaux aux critères sanitaires performants. Les informations indispensables à prendre en compte pour leur évaluation sont les suivantes : leurs émissions de composés organiques volatils et aldéhydes, leurs émissions de fibres et de particules en suspension, leur comportement face aux microorganismes nuisibles, leur comportement face à l’humidité, leurs émissions radioactives, électro-magnétiques, et leurs émissions de substances dangereuses.
Ces indications peuvent se retrouver dans les fiches de déclaration environnementale et sanitaire (FDES), certaines à travers l’étiquetage des émissions en polluants volatils des produits de construction et d’autres dans les labels du produit.

En phase Exécution, le respect d’un chantier propre limitera les pollutions et les impacts sur l’environnement. L’implication des entreprises est primordiale pour faciliter la démarche et la diminution des rejets.

En phase Exploitation, la limitation des impacts est lié à 3 points : choix des matériaux et systèmes (cible 2), intégration/ accessibilité (cible 7, 12) dans le bâti et achat de produits d’entretien-maintenance (cible 7) sains.

Il est donc possible de limiter l’introduction et l’utilisation de polluants dans un bâtiment.

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